Énergie & environnement
Parcs éoliens et patrimoine : le Conseil d’État affine la méthode d’évaluation de l’impact sur les monuments historiques

Par une décision récente, le Conseil d’État précise la méthode que les juridictions doivent suivre pour évaluer les effets visuels d’un projet éolien sur un monument historique protégé. L’arrêt clarifie la manière dont doivent être appréciées les vues sur et depuis le monument, enjeu central dans les contentieux opposant les développeurs de parcs éoliens aux défenseurs du patrimoine.
Le cadre juridique : l’autorisation environnementale et la protection des monuments
L’article L.181‑3 du Code de l’environnement subordonne la délivrance d’une autorisation environnementale à la démonstration que le projet ne crée pas de danger ou d’inconvénient pour les intérêts protégés par l’article L.511‑1, parmi lesquels figure expressément la conservation des sites et des monuments historiques.
Dans ce contexte, un parc éolien peut être refusé ou annulé s’il génère une atteinte excessive à la perception ou à la valeur patrimoniale d’un monument, du fait notamment de son impact visuel dans le paysage environnant.
Le litige : impact d’un parc éolien sur un château classé
Saisie d’un recours contre une autorisation environnementale délivrée pour un parc éolien en Gironde, la cour administrative d’appel de Bordeaux avait annulé la décision, considérant que les photomontages produits révélaient une atteinte trop forte aux perspectives depuis un château classé situé à proximité.
L’exploitant du parc s’est pourvu en cassation, soutenant que la juridiction d’appel avait mal apprécié la portée de ces « vues » et leur lien réel avec la conservation du monument.
La précision méthodologique apportée par le Conseil d’État
Le Conseil d’État pose une grille d’analyse nuancée. Pour évaluer l’impact d’une installation sur la conservation d’un monument historique, deux types de vues doivent être pris en considération :
- Les vues portées sur le monument, c’est‑à‑dire la perception du bâtiment depuis son environnement extérieur ;
- Les vues offertes depuis le monument lui‑même, mais seulement lorsque ces vues proviennent de points normalement accessibles et que leur qualité contribue effectivement à la mise en valeur ou à la compréhension du monument.
Le Conseil ajoute qu’il est possible de retenir ces vues même lorsque le monument est fermé au public, à condition de tenir compte de cette circonstance dans l’évaluation de leur valeur patrimoniale.
La CAA de BORDEAUX aurait alors dû vérifier si les vues depuis le château concerné participaient réellement, par leur qualité, à la conservation du monument. À défaut, sa motivation était juridiquement insuffisante.
Cette décision réaffirme la volonté du Conseil d’État de trouver un équilibre entre les objectifs de transition énergétique et la préservation du patrimoine architectural et paysager.
En fixant des critères précis de prise en compte des vues visuelles et esthétiques, la haute juridiction offre aux juridictions du fond et aux porteurs de projets une méthode d’analyse fondée sur la valeur patrimoniale concrète des perspectives affectées.
Ce raisonnement tend à encadrer les contentieux relatifs à l’impact visuel des éoliennes sur les monuments historiques, tout en renforçant la sécurité juridique des décisions administratives d’autorisation.
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