Énergie & environnement
Photovoltaïque et ENAF : la QPC sur l’avis conforme de la CDPENAF écartée par le Conseil d’État

Le Conseil d’État a récemment refusé de transmettre au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) relative à l’exigence d’un avis conforme de la commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers (CDPENAF) pour les projets agrivoltaïques.
La société Verso Energy, spécialisée dans le développement de parcs photovoltaïques, contestait en effet le décret d’application de la loi APER du 10 mars 2023, créant un double régime juridique pour les projets photovoltaïques implantés sur des terres agricoles, naturelles ou forestières.
Deux régimes juridiques distincts issus de la loi APER
L’article 54 de la loi n° 2023-175 du 10 mars 2023 – loi sur l’accélération de la production d’énergies renouvelables (APER) – prévoit :
- Pour les projets agrivoltaïques, un avis conforme de la CDPENAF, qui conditionne la délivrance de l’autorisation.
- Pour les projets photovoltaïques simplement compatibles avec l’activité agricole, pastorale ou forestière, un avis simple de la CDPENAF, sauf en période transitoire, dans l’attente de l’adoption des documents-cadres (C. urb., art. L. 111-31).
C’est cette différence de régime qui a conduit la société requérante à déposer une QPC, en invoquant une atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution.
Argumentaire de la société requérante
Selon la société requérante, l’exigence d’un avis conforme :
- transférait indûment à la CDPENAF une part du pouvoir d’autorisation normalement confié à l’administration,
- liait l’autorité administrative à l’avis d’un organisme perçu comme « non impartial », dès lors que ses membres se prononcent essentiellement au regard de l’objectif de protection des sols agricoles, forestiers et naturels, sans réelle prise en compte des enjeux liés à la transition énergétique.
La présence de représentants issus de chambres d’agriculture, parfois directement impliquées dans l’étude agricole préalable d’un projet, était notamment mise en avant comme un facteur de partialité.
La position du Conseil d’État : grief non sérieux
Le Conseil d’État écarte ces arguments et considère que :
- les garanties posées par l’article 16 de la Déclaration des droits de l’Homme et du Citoyen ne s’appliquent pas à une autorité administrative qui ne rend qu’un avis, même conforme ;
- la participation de représentants issus de catégories professionnelles déterminées n’est pas, en soi, de nature à créer une partialité institutionnelle ;
- les membres de la CDPENAF sont, par ailleurs, soumis à des obligations d’impartialité et de transparence imposées par la loi.
Ainsi, une éventuelle suspicion de conflit d’intérêts pourra uniquement être examinée au cas par cas devant les juges du fond, mais ne saurait fonder le renvoi d’une QPC.
Compétence limitée de la CDPENAF
Le Conseil d’État en profite également pour rappeler que la CDPENAF ne peut pas :
- se prononcer sur la durée des autorisations,
- imposer aux exploitants des garanties financières spécifiques,
- ni réglementer les modalités de démantèlement des installations.
Son rôle doit rester limité à l’appréciation de l’impact des projets sur les espaces naturels, agricoles et forestiers.
Un signal fort pour les projets agrivoltaïques
Cette décision confirme la solidité du dispositif instauré par la loi APER : l’avis conforme de la CDPENAF reste une étape incontournable pour les développeurs de projets agrivoltaïques. Les porteurs de projets devront donc intégrer, très en amont, une analyse fine de la compatibilité de leur installation avec les objectifs de préservation des sols agricoles et naturels.
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