Urbanisme & aménagement
Urbanisme : obligation pour le maire de dresser un procès-verbal d’infraction

Le Conseil d'Etat a récemment rendu un avis relatif à l'étendue des obligations en matière de constat d'infractions en matière d'urbanisme. La question soulevée dans cet avis porte plus précisément sur l’étendue des obligations du maire lorsqu’il est informé de la réalisation de travaux irréguliers et sur le contrôle opéré par le juge de l’excès de pouvoir en matière d’infractions d’urbanisme.
L’analyse faite par le juge précise deux points essentiels : (1) la temporalité du contrôle de légalité dans le contentieux de l’excès de pouvoir et (2) l’étendue de l’obligation de dresser procès-verbal dès lors que l’infraction est caractérisée.
Temporalité du contrôle de légalité : date de l’acte contesté
Par principe, le juge de l’excès de pouvoir apprécie la légalité d’un acte à la date de son édiction. Des exceptions existent, notamment lorsqu’il s’agit d’assurer un plein effet utile à l’action juridictionnelle au regard de l’évolution ultérieure des circonstances.
En l’espèce, le Conseil d'Etat indique qu’un tel raisonnement n’a pas sa place lorsque le recours est dirigé contre le refus du maire de dresser procès-verbal d’infraction. La légalité du refus doit exclusivement s’apprécier à la date à laquelle celui-ci a été pris, sans tenir compte d’évolutions postérieures.
Obligation du maire en matière d’infractions d’urbanisme
Les articles L. 480-1 et L. 480-4 du Code de l’urbanisme posent un régime impératif :
- Le maire (ou le président de l’EPCI compétent) est tenu de dresser procès-verbal dès qu’il a connaissance d’une infraction relevant de l’article L. 480-4 (travaux exécutés sans autorisation ou en méconnaissance d’une autorisation).
- Il doit, sans délai, en transmettre copie au ministère public, seul compétent pour décider de poursuites.
Cette obligation n’est pas affectée par :
- l’écoulement du temps,
- la régularisation ultérieure des travaux par délivrance d’un permis, qui n’efface pas l’infraction initiale.
Autrement dit, un permis de régularisation met fin à l’illégalité d’occupation du sol, mais ne fait pas disparaître l’infraction pénale déjà consommée, seule l’action du parquet pouvant éteindre ou poursuivre celle-ci.
Pouvoirs et devoirs du juge administratif
Lorsque le juge annule le refus du maire :
- Il doit en principe enjoindre au maire de dresser procès-verbal et d’en transmettre copie au parquet.
- Exception : si, à la date où il statue, l’action publique est prescrite (délai de prescription pénale échu), une telle injonction ne conserve plus d’effet utile.
Portée pratique de cet avis
Cette analyse clarifie la responsabilité du maire en matière de contrôle de la légalité des constructions en zone urbaine ou agricole :
- Le maire ne dispose d’aucune marge d’appréciation : dès qu’il a connaissance d’une infraction, le PV est obligatoire.
- Les exploitants et constructeurs ne peuvent pas espérer échapper à la transmission au procureur par le seul écoulement du temps ou par une régularisation a posteriori.
- Pour les tiers qui contestent l’inaction municipale, le juge statue sur la légalité du refus au jour où il a été pris, assurant une sécurité juridique.
Cet avis consolide la jurisprudence selon laquelle la pénalisation des infractions d’urbanisme est un élément incontournable de protection de l’ordre public (occupation des sols, sécurité publique, respect des autorisations d’urbanisme).
Deux enseignements doivent être retenus :
- Les communes doivent être vigilantes : ne pas dresser PV expose le maire à un contrôle et, potentiellement, à une injonction juridictionnelle.
- Pour les praticiens, cet avis confirme la distinction essentielle entre le contentieux administratif, qui examine la légalité des refus d’agir du maire, et l’action publique pénale, seule compétente pour apprécier la poursuite ou non de l’infraction.
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